1 novembre 2018
Dans sa réponse à la question du Sénateur Jean-François Rapin, relative aux centres de santé bucco-dentaires dits « low-cost » [1], Mme Buzyn ré-affirme son objectif : offrir une prise en charge sans dépassement d’honoraires et sans avancement de frais pour tous, avec des centres de santé particulièrement accessibles aux publics les plus fragiles afin de garantir un égal accès à l’offre de soins, en tout point du territoire, pour tous les citoyens.
Elle souhaite non seulement renforcer l’offre de soins mais également en garantir la qualité et la sécurité. Elle évoque ensuite l’ordonnance du 12 janvier 2018 et ses textes d’applications, qui servent pleinement ce double dessein, en favorisant l’essor des centres de santé. En effet la loi en permet la création par davantage d’acteurs de santé, notamment par les sociétés coopératives d’intérêt collectif ( SCIC).
Que sont les SCIC ?
Les SCIC sont des sociétés coopératives dans lesquelles, outre les fournisseurs de services ou de biens et leurs bénéficiaires ou clients, les collectivités locales peuvent librement entrer au capital et participer d'une gouvernance partagée.
Solution nouvelle, ce statut est légalement possible depuis 2001. Il prend en compte les évolutions institutionnelles récentes qui renforcent la légitimité et les responsabilités des collectivités locales, de la Commune à la Région, dans le maintien et le développement d'activités économiques ou d'utilité sociale sur leur territoire.
Les SCIC répondent à cette nécessité d'impliquer toutes les parties prenantes d’un projet lié au développement d’un territoire, elles sont un formidable levier d'innovation sociale.
« La SCIC fait partie de cette nouvelle entreprise à promouvoir, une entreprise de demain, inventant d'autres formes de régulation que le seul marché, créant de nouvelles chaînes de valeur. »[2]
On compte aujourd’hui 600 SCIC environ en France dans divers domaines, en particulier un EHPAD à Versailles et une maison de santé à Clichy-sous-Bois.
En adoptant le statut SCIC, les porteurs de projet font le choix de s’inscrire dans une logique de société coopérative, d’agir ensemble pour gagner en puissance et en pertinence, et de garantir le respect de ces deux caractéristiques fondamentales et indissociables :
- Viabilité économique du projet ( activité qui crée des richesses, du travail, de l'emploi)
- Réalité de l'intérêt collectif ( dynamique collective des différentes parties-prenantes en lien avec l'activité
Conféré par le multi-sociétariat et une gouvernance impliquant toutes les parties-prenantes, le caractère d'utilité sociale est inhérent à toute SCIC. On y retrouve trois types de sociétaires :
- les salariés (ou, en leur absence, des producteurs du bien ou service vendu par la SCIC)
- les bénéficiaires (clients, fournisseurs, collectifs de toute nature, …)
- un troisième type d'associé selon les ambitions de la coopérative (collectivité locale, entreprise privée – société, artisan, association, profession libérale, exploitant agricole, investisseur, bénévole…)
Toute personne physique et morale, de droit privé ou de droit public, peut devenir un associé de la coopérative, spécificité qui intéresse de nombreux porteurs de projets, faisant de la SCIC un statut de plus en plus connu et attractif.
Quand une collectivité participe à une SCIC, elle joue un rôle actif aux côtés des autres acteurs, ce qui facilite la transmission d’informations avec le terrain, améliore la qualité de la relation, la cohérence de la décision publique, contribue à sa légitimité, et enfin renforce la cohésion sociale et économique de son territoire.
La gouvernance de la SCIC est établie selon le principe une personne (physique ou morale) = une voix, ce qui permet de décorréler la capacité de décision du nombre de parts sociales détenues. Quelque soit le nombre de parts sociales détenues, quelque soit sa qualité, la personne associée ne dispose que d’une seule voix.
57.5% du résultat déductible de l’assiette imposable
La fiscalité présente l’originalité de déduire de l’assiette imposable au minimum 57,5% du résultat, qui seront dévolus à une réserve impartageable, destinée à être ré-investie.
Enfin la SCIC invente ses statuts et les adapte à son territoire, de façon à répondre au mieux à ses spécificités.
La SCIC solution de choix pour un centre de santé ?
C’est un choix novateur dans le domaine de la santé, peu ou pas usité en France, contrairement au Québec où on le retrouve sous forme de « Coopératives de santé ».
Ce choix fédère au sein d’une société 3 types d’acteurs :
- Tous les professionnels salariés
- Les patients bénéficiaires des soins
- Les contributeurs (professionnels libéraux, sociétés scientifiques, investisseurs, bénévoles, associations, établissements d’enseignement, institution, collectivités locales ….)
avec le principe une personne associée = une voix, éventuellement pondéré dans les statuts par un système de collèges.
La rédaction des statuts permet de fixer les particularités du projet, et notamment d’en déterminer sa finalité, d’énoncer les convictions et les valeurs qui le sous-tendent, d’y adjoindre une charte d’engagement à leur respect, toujours au service de l’intérêt collectif.
C’est un organisme à gestion désintéressée, avec un objectif d’efficacité économique doublé d’une dimension sociale, adapté au secteur territorial dans lequel s’exerce l’activité.
Les professionnels peuvent au choix s’y investir en tant que salariés ou libéraux.
La gouvernance multipartite permet d’asseoir au centre du projet la relation de soins, avec un patient promu acteur de sa santé, et des professionnels de santé libres et responsables de leurs choix thérapeutiques. Elle permet notamment de préserver l’indépendance de la structure face aux investisseurs, et le risque de déviances non-éthiques liées à une recherche purement économique de profits.
Le centre de santé constitué en SCIC, au plus près des besoins d’une population, et d’un territoire, facilite l’évolution des patients qui ne sont plus seulement des receveurs de soins, mais des acteurs associés à la gestion de l’offre de soin.
Enfin, le système n’est plus centré sur l’offre de soins, mais sur la demande.
La SCIC symbolise la réunion d’individus souhaitant se regrouper pour agir en tant qu’êtres humains responsables. Elle concrétise la convergence des intérêts à la fois du patient, du professionnel de santé et de la gouvernance qui tous partagent un même objectif :
le maintien « en santé » de tous.
Références :
(1) Pratique de la dentisterie à prix réduit
Question n° 03030 adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé
Publiée le : 01/02/2018
Réponse de Mme la ministre des solidarités et de la santé
JO du Sénat: 09/08/2018, page 4183
(2) La SCIC : une coopérative au service des territoires.
Cours CNAM 2018 du Centre National Fonction Publique Territoriale